sainte-marie des cabanes

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forteresse de "solitude"

dimanche 17 mai 2015

Substances initiatrices, Kykéon et temple de Déméter à Taman.



- les drogues sont d’abord le secret des dieux, supposés tirer leurs puissances de quelques mystérieuses préparations : l’ambroisie, qui remplaçait la nourriture solide, et le nectar qui remplaçait le vin, deux substances imaginées comme source de l’éternité des dieux ;
- jusqu’à ce que les humains s’emparent de ces principes d’abord à des fins religieuses, puis médicales, et enfin personnelles. 
Cette séquence se retrouvera systématiquement tout au long de l’histoire. Ce qu’il faut retenir est la quête universelle et millénaire d’une substance qui serait panacée, c’est-à-dire remède universel ou pilule du bonheur.
Par exemple, contre le choléra, il fut un temps où la réponse grecque était celle du sacrifice, dans un premier temps celui d’un jeune homme, puis, par la suite d’un bouc que les grecs nommaient : pharmakos, dont le rôle d’émissaire était comparable à celui des hébreux. Ce sacrifice du pharmakos était bien sûr un rite religieux, sensé opérer une katharsis – ici au sens de purification – qui devait apaiser la colère divine et suspendre l’épidémie pensée comme punition envoyée par les dieux : le sacrifice d’un pur afin de purifier la Cité impure
Avec la découverte du pavot et donc de l’opium, la médecine apporta une révolution dans les mœurs dans la mesure où, pour contrer la colère des dieux, l’opium suffisait par lui-même et permit le passage du pharmakos au pharmakon, ce dernier opérant, lui aussi, unekatharsis, mais ici au deuxième sens du terme, celui de purgation. Transformation qui est aussi le passage, très classique, du sacré au profane, du religieux au médical, ou du divin à l’humain.



Hippocrate prescrivait donc l’opium aussi bien contre le choléra que l’hystérie, et passe d’ailleurs pour le créateur du terme opium : opei mekonos, ce qui signifie « jus de pavot ». Héraclite de Tarente, médecin de Philippe de Macédoine, prescrivait ce jus contre toutes les douleurs. Quant aux célèbres médecins du Temple d’Esculape, ils servaient une boisson particulière au malade puis lui demandaient, le lendemain matin, de raconter son rêve : et de l’interprétation du rêve découlait le diagnostic et le traitement de la maladie.
Pour le peuple, toujours plus religieux que les médecins de cette époque, le pavot était associé à Déméter, déesse de la fécondité : ainsi les femmes sans enfants portaient des broches de fleurs de pavot dans l’espoir de devenir fécondes.
D’autres substances étaient employées notamment dans les cérémonies religieuses, telles que l’ergot du seiglel’orgê qui produisait des transes qui, selon les Mystères pratiqués, menait aux orgies et s’achevaient en orgie d’orgasmes ; ou bien menait à la révélation (apokalupto) par exemple lors des Mystères d’Éleusis ; c’était aussi la substance qui inspirait la Pythie, jeune fille toujours vierge, elle, afin de prouver que sa parole est pure, soufflée, inspirée par les dieux.
Souvenons-nous qu’il y avait alors deux types de médecine à cette époque :
- l’une, qui était reliée à Hermès et qui se pratiquait dans les temples, comme par exemple à Épidaure, utilisaient les drogues dans le but d’entendre une parole divine ainsi délivrée par la bouche du consultant et révélatrice de la nature du mal ;
- l’autre, qui était reliée à Apollon et dont le représentant le plus connu est Hippocrate, utilisaient les drogues comme pharmakon, et c’est le médecin qui révélait la nature du mal. Cet homme fut un des premiers à différencier le mal physique du mal moral, c’est-à-dire à dissocier le divin (comme source de tous les maux) de l’humain (comme lieu de tous les maux). 
Et puis, il y avait le vin, cadeau vengeur de Dionysos – Bacchus, que célébraient les Dionysies après les vendanges : on y buvait du vin bien sûr, mais aussi une bière mélangée à des baies de lierre qui sont toxiques, mais hallucinogène à faible doses (de même que l’amanite tue-mouche). Ces boissons produisaient donc, chez les participants, une mania, c’est-à-dire une folie délirante individuelle (d’où le nom de mainades ou ménades, futures bacchantes romaines), puis une panique, c’est-à-dire une folie collective qui amenait à la dissolution des lois de la Cité.
Eschyle, dit-on, était ivre en permanence et Homère stimulait son inspiration avec ce jus fermenté. Quant à Aristote, il reconnaissait au breuvage un pouvoir essentiel, celui de produire une aphobia, c’est-à-dire la suspension de la peur de penser, condition essentielle du génie. (Il nous fit remarquer en passant que tous les grands dialogues de Platon se tenaient à la sortie d’un banquet...)

Il y a, en fait, une opposition ou séparation entre les drogues et le vin, et ce dernier gardera toujours un régime légal à part et ne sera pratiquement jamais, comme les autres drogues, une prescription de la médecine officielle (mais une auto-prescription surtout chez le pauvre). Il porte, à sa façon, la trace de son origine dionysiaque en tant que source de dissolution des lois sociales (la panique), donc de violences.

2 – Avec les Romains, priment toujours le pavot et la vigne. Et d’ailleurs, depuis la Lex Cornelia, toutes les substances sont autorisées sauf si elles tuent. Ainsi Marc Aurèle prenait tous les matins une grosse noix d’opium dans du vin chaud. C’est l’Etat qui contrôlait le prix de l’opium et en l’an 312, 793 boutiques étaient officiellement reconnues à Rome, ce qui, soit dit en passant, rapportait 15% des recettes fiscales de l’Etat.
En revanche, l’alcool était critiqué dans la mesure où il était une source de violences et fut donc sujet à répression ainsi que le culte de Bacchus qui y est lié. Par exemple, le Consul Spurius Portumus, pour l’année 186 av. J.C., avait dénombré 7 000 morts liées à l’usage du vin. Ce qui vient accentuer l’opposition entre drogues et vin (et peut être aussi le fait de la non classification du vin dans le registre des drogues).

http://www.psychanalyse.lu/articles/BernatDrogues.htm

Les secrets du temple de Déméter à Taman

Les secrets du temple de Déméter à Taman

L’attention de tous les archéologues du monde est rivée sur le nouveau temple qui a été découvert sur la péninsule de Taman, dans le Pritchernomorié (région de la mer Noire), consacré à la déesse Déméter. Selon les chercheurs, le seul analogue de cette découverte archéologique pourrait être le célèbre Stonehenge en Angleterre. L’un des rites les plus mystérieux de l’Antiquité était célébré dans ce sanctuaire unique sur le territoire de la Russie et des pays de la CEI, qui a 50 ans de plus que le Parthénon. Il s’agit des mystères d'Eleusis.

Découverte sensationnelle près du village Vestnik sur la péninsule de Taman a intéressé les scientifiques de nombreux pays. Le planning du chercheur en histoire Nikolaï Soudarev, le chef de l'expédition à l'Est du Bosphore de l'Institut d'archéologie de l'Académie russe des Sciences, qui a découvert le temple, est aujourd'hui bien rempli. Il a déjà rendu visite à ses collègues en Allemagne, et compte partir en Italie prochainement. L’archéologue est convaincu que d'autres fouilles confirmeront que le bâtiment qui a été découvert n’est qu’une infime partie d’un énorme temple. Construit selon tous les canons classiques de la Grèce antique, cette construction, énorme pour son époque, aurait pu être érigée uniquement avec la participation du pouvoir suprême du royaume de Bosphore.
«Il devient évident que ce bâtiment hors du commun est bien public», note-t-il. «Ce qui veut dire qu’il n’a pas été construit grâce à des fonds privés, mais bien pour des fonds publics, ou grâce à l’argent de la communauté, avec de bons architectes et des maçons, et l'ajustement minutieux des pierres. Même maintenant, il est difficile d’insérer un couteau entre les pierres. Tout a été fait non pas avec une lame, qui n’existait pas à l’époque, mais avec des petits burins. C’est un travail très précis et de très bonne qualité».
D'autres découvertes, y compris l'autel et la statue représentant la déesse Déméter, qui tient sur ses épaules sa fille Perséphone confirment bien que le temple est dédié à la déesse grecque de la fertilité et l'agriculture. Selon les mythes, à la suite de l'enlèvement de sa fille par le Dieu du monde sous-terrain, Déméter s’est retirée dans la petite ville d'Eleusis, à 22 kilomètres d'Athènes, et a juré qu'aucun germe ne poussera à travers la terre, tant qu’on ne lui rende pas Perséphone. La fille lui a été rendue, et Déméter a fait en sorte que la terre commence à fleurir. Les mystères d'Eleusis étaient nés au 15e  siècle avant J.-C., et ont symbolisé le retour de Perséphone.
«Les mystères d'Eleusis – c’est une sorte de passage pour le paradis souterrain», poursuit Nicolaï Soudarev. «Avant, les Grecs percevaient la vie d’outre-tombe, comme une errance dans l’Hadès. Et ces mystères donnaient la possibilité d’accéder à l'Elysée - une sorte de paradis pour les Grecs morts, où leurs âmes s’amusaient pour toujours. C’est pour cela qu’une telle initiation était nécessaire».
La singularité du complexe du temple à Taman réside dans le fait qu'il est situé dans une nécropole unique, appartenant à la période avant-grecque. A ce moment là, la presque-île de Taman était peuplée par une tribu barbare des Sindes.
On sait très peu de choses sur la cérémonie en soi. Les scientifiques débattent encore sur la manière, dont elle se déroulait, car la procédure était gardée en secret et les participants prêtaient serment sous peine de mort pour la non-divulgation des détails de son déroulement, et les passants étaient tués sans pitié. Beaucoup d'historiens croient que pendant le déroulement de ces cérémonies, les participants étaient sous l'effet des substances psychotropes, notamment le kykéon - une infusion spéciale à base de l'orge et de la menthe, qui les faisait plonger dans un profond état mystique.

Ceux dont les langues étaient liées étaient les mystai (du Grec muein, parler à voix sourde, au travers des lèvres fermées), ceux qui participaient aux rites. Par une astuce littéraire, l'Hymne Homérique révèle ce qu'il dit ne pas pouvoir être dévoilé par les mystai. Au début de l'Hymne, lorsque Déméter, la déesse des grains d'Eleusis, apparaît sous une forme humaine à la reine Metanira, cette dernière lui offre une boisson d'hydromel, du “vin sucré de miel”, mais Déméter le refuse en disant de façon assez énigmatique qu'il ne lui est pas permis de boire de cette potion. Par contre, elle instruit Metanira de préparer un autre breuvage “d'eau avec de l'orge et de la menthe pouliot fraîche”. Cette boisson à base d'orge est le kikeon, la potion enthéogénique bue durant les Grands Mystères d'Eleusis et ailleurs dans les enceintes des Mystères dans tout le monde classique. 

Dans l'ancien temps, à Eleusis, l'orge croissait dans la Plaine Rharienne qui longeait la ville. De façon mystérieuse, une partie de la récolte était appelée “orge blanc”, alors même qu'elle était colorée par l'ergot, Claviceps purpurea, qui infestait les grains et les décolorait en violet-noir. Travaillant avec G. Gordon Wasson, le chimiste Suisse Albert Hofmann, qui découvrit le LSD, démontra que le kykeon d'Eleusis, la boisson demandée par Déméter, était une potion psychédélique dont les propriétés actives dérivaient de l'enthéogène fongique, l'ergot.


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